CMDR - Corps : Méthodes,  Discours, Représentations
 

Colloque : « corps et représentations : une liaison dangereuse »

Le col­­lo­­que est orga­­nisé par le labo­­ra­­toire junior CMDR et aura lieu à l’Ens de Lyon du 16 au 18 octo­­bre.

Après lec­­ture des pro­­po­­si­­tions, les mem­­bres du labo­­ra­­toire sou­­met­­tront leur sélec­­tion aux mem­­bres du comité scien­­ti­­fi­­que com­­posé des per­­son­­na­­li­­tés sui­­van­­tes :

Comité scientifique

  • Anne Berger - Directrice de l’Institut du genre GIS-CNRS
  • Eric Bordas - Professeur des Universités - Ens de Lyon
  • Eric Dayre, Professeur des Universités - Ens de Lyon
  • François Kerlouégan, Maître de Conférences - Université Lumière Lyon 2
  • Nadeije Laneyrie-Dagen, Professeur des Universités, Ens
  • Marie-Thérèse Mourey, Professeur des Universités - Paris Sorbonne
  • Georges Vigarello, Directeur de recherche - EHESS

Appel à communications

Corps et représentations : une liaison dangereuse ?

Le corps est devenu un objet cen­tral de la recher­che en scien­ces humai­nes : l’his­toire de l’art, la phi­lo­so­phie, la socio­lo­gie, l’his­toire et la lit­té­ra­ture s’en sont empa­rées et inter­ro­gent deux corps bien dif­fé­rents. Le pre­mier est un corps média­tisé par un sys­tème de repré­sen­ta­tion, un corps sémio­ti­que. C’est ce corps-là que l’on retrouve dans les œuvres d’art mais aussi dans des sour­ces non artis­ti­ques – comp­tes rendus de procès, cor­res­pon­dance privée etc. – qui ont recours à un sys­tème d’écriture. Ce sys­tème de repré­sen­ta­tion est ana­ly­sa­ble en termes de forme sym­bo­li­que, au sens où l’entend Panofsky1. Le second corps serait le corps réel, le réfé­rent du sys­tème d’écriture, ou le corps vécu par des indi­vi­dus à un moment donné de l’his­toire. C’est ce corps-là qui se révèle le plus dif­fi­cile à recons­truire, au point que depuis l’évolution de l’his­toire des men­ta­li­tés vers une his­toire des repré­sen­ta­tions2 , il est cou­ram­ment admis que l’étude d’un objet ne peut être qu’une étude de ses repré­sen­ta­tions. Cela s’appli­que par­ti­cu­liè­re­ment à l’étude du corps dont seules les repré­sen­ta­tions sem­blent acces­si­bles au cher­cheur en scien­ces humai­nes.

C’est dans ce pas­sage du corps repré­senté au corps réfé­rent (et vice-versa) que réside le danger de l’inter­pré­ta­tion, pour toutes les scien­ces humai­nes, un danger cepen­dant néces­saire puis­que c’est le prix à payer pour pou­voir dire quel­que chose du corps. Le col­lo­que s’atta­chera donc à la fois à penser la place du corps réel dans le sys­tème de repré­sen­ta­tion, l’orga­ni­sa­tion des formes de la repré­sen­ta­tion en fonc­tion du corps et le statut du corps repré­senté : il s’agira de réflé­chir à la rela­tion entre le corps réel et ses formes sym­bo­li­ques, en sou­li­gnant les enjeux esthé­ti­ques, poli­ti­ques et sociaux pro­pres aux études sur le corps. Nous pri­vi­lé­gie­rons les inter­ven­tions don­nant une place non négli­gea­ble à une théo­ri­sa­tion des notions. Nous pro­po­sons ces quel­ques axes de réflexion, qui ne sont pas exhaus­tifs :

Réversibilité de la structure corps réel / corps représenté

Les repré­sen­ta­tions du corps sont-elles une façon de dis­ci­pli­ner le corps réel, une struc­ture pro­fon­dé­ment poli­ti­que où se joue un pro­ces­sus de « civi­li­sa­tion des mœurs » Norbert Elias,3 et donc un espace de créa­tion de normes ? Face à cette logi­que, la dés­ta­bi­li­sa­tion des sys­tè­mes de repré­sen­ta­tion (hybri­dité, écriture de la téra­to­lo­gie) opérée par les dif­fé­rents arts est-elle une façon de repen­ser le statut du corps ?

Les formes de la représentation du corps

Si la repré­sen­ta­tion du corps relève d’une forme sym­bo­li­que qui tra­duit un rap­port géné­ral au monde, peut-on parler d’une spé­ci­fi­cité de la repré­sen­ta­tion du corps ? On pourra s’inter­ro­ger sur dif­fé­rents modes de repré­sen­ta­tion et sur leur inci­dence sur celle-ci. Le corps peut-il fonc­tion­ner comme un sym­bole, dont Goethe disait qu’il syn­thé­tise des éléments dis­pa­ra­tes tout en ren­voyant à l’uni­ver­sel ? Le sym­bole permet-il de main­te­nir à la fois le réfé­rent et le sys­tème qui le dépasse ou liquide-t-il le corps réel au profit d’une struc­tu­ra­tion qui vise à le rendre tota­le­ment admis­si­ble ? Dans quel sys­tème de valeurs le réins­taure-t-il alors ? Dans cette même logi­que, on pourra s’inté­res­ser au statut de la marque sur le corps. Toute marque sur la peau est tou­jours signe, et en tant que tel, pro­messe her­mé­neu­ti­que, sup­port d’une inter­pré­ta­tion des­ti­née à être mise en dis­cours.

Violence de la représentation

Enfin, on pourra s’inter­ro­ger sur la vio­lence que peut géné­rer le pas­sage – voire la coexis­tence – du corps réfé­rent au corps repré­senté, dans une société où, selon Baudrillard par exem­ple, le corps se réduit à un sys­tème de signes, à une mar­chan­dise parmi d’autres, au prix d’une vio­lence fon­da­men­tale faite au corps réel4. L’uti­li­sa­tion par cet auteur, ou encore par Agamben5 , des modè­les économiques ou psy­cha­na­ly­ti­ques pour penser le corps réel ou le corps repré­senté (dans l’art par exem­ple) pourra être inter­ro­gée, ou réin­ves­tie dans les com­mu­ni­ca­tions. Enfin, la vio­lence de la repré­sen­ta­tion pose le pro­blème du corps du lec­teur / spec­ta­teur et peut amener à repen­ser une théo­rie de la récep­tion en fonc­tion du corps.

Les pro­po­si­tions de com­mu­ni­ca­tion sont à faire par­ve­nir à l’adresse sui­vante : labocm­dr@g­mail.com avant le 15 jan­vier 2013, au format .doc. Les com­mu­ni­ca­tions pour­ront être faites en fran­çais ou en anglais. Une courte notice bio­gra­phi­que (nom, prénom, adresse mail, adresse, statut, dis­ci­pline, ins­ti­tu­tion, recher­ches en cours) pré­cé­dera le titre de l’inter­ven­tion et le résumé pro­posé qui n’excé­dera pas 500 mots. Le col­lo­que, orga­nisé par le labo­ra­toire junior « Corps : Méthodes, Discours, et Représentations » se dérou­lera à l’ENS de Lyon du 16 au 18 octo­bre 2013. Le budget est en cours de réa­li­sa­tion et nous pré­ci­se­rons ulté­rieu­re­ment les pos­si­bi­li­tés de finan­ce­ment.

Call for papers

Body and representations : a dangerous liaison ?

Research in human scien­ces has pro­gres­si­vely focu­sed on the body : art his­tory, phi­lo­so­phy, socio­logy, his­tory and lite­ra­ture has seized on it, exa­mi­ning it from two dis­tinct pers­pec­ti­ves. There are in fact two bodies. The first we can reach through sys­tems of repre­sen­ta­tion, art, of course, but also non-artis­tic sour­ces : it relies on wri­ting (law­suits, pri­vate cor­res­pon­dence, etc.). This system of repre­sen­ta­tion can be ana­ly­sed through the Panofsky’s6 concept of sym­bo­lic form. The second body, on the other hand, is the real one, the wri­ting system’s refe­rent, the live body expe­rien­ced by indi­vi­duals as their own his­to­ri­cally deter­mi­ned one. It is this one which is the most dif­fi­cult to recons­truct. Indeed, the evo­lu­tion of cultu­ral and intel­lec­tual stu­dies has limi­ted the ana­ly­sis of this body to the his­tory of its repre­sen­ta­tions alone7 . This is par­ti­cu­larly true for stu­dies of the human body, for resear­chers - espe­cially as far as the human scien­ces are concer­ned - seem only to have access to repre­sen­ta­tions. It is in the pas­sage from the repre­sen­ted body to its refe­rent (and vice-versa) that the danger of inter­pre­ta­tion lies, at least for the human scien­ces. Nevertheless, this danger is also neces­sary, for it is the price we have to pay in order to say any­thing about the body. The pur­pose of our col­lo­quium is to ques­tion the place of the real body within a system of repre­sen­ta­tion. We are equally inte­res­ted in the orga­ni­sa­tion of the forms of repre­sen­ta­tion that concern the body, and the status of the repre­sen­ted body. We intend to inves­ti­gate the rela­tion bet­ween the real body and its sym­bo­lic forms, insis­ting on aes­the­tic, poli­ti­cal, and social issues spe­ci­fic to stu­dies of the body. We would par­ti­cu­larly appre­ciate com­mu­ni­ca­tions focu­sing on theory. Possible sub­jects might include the fol­lo­wing :

Real body/represented body : reversibility of the structure.

Are repre­sen­ta­tions a means to domi­nate over the real body, a deeply poli­ti­cal struc­ture where a pro­cess of “civi­li­sa­tion des moeurs”8 is at play ? Is the body no more than a space for crea­ting norms ? Does the des­ta­bi­li­za­tion of sys­tems of repre­sen­ta­tion at work in so many of the arts (hybri­dism, tera­to­logy in wri­ting, etc.), appear as a way to rethink the status of the body ?

The forms of the representation of the body

If the repre­sen­ta­tion of the body depends on a sym­bo­lic form that expres­ses a gene­ral rela­tion to the world, can we say that the body is repre­sen­ted in a spe­ci­fic way ? Various modes of repre­sen­ta­tion and their influence on the repre­sen­ta­tion itself could be ques­tio­ned. Can the body be consi­de­red as a symbol, along the lines of Goethe’s theo­ri­sa­tion, that is, as a par­ti­cu­lar struc­ture syn­the­ti­zing various ele­ments while simul­ta­neously linked to the gene­ral ? Can the symbol main­tain both the refe­rent and the larger system that sur­rounds it, or does it obli­te­rate the real body in order to render it enti­rely accep­ta­ble ? In which system of values is it then rein­te­gra­ted ? Similarly, the status of the mark on the body can be exa­mi­ned. Every mark on the skin is a sign, and, as such, a her­me­neu­tic pro­mise, which allows an inter­pre­ta­tion that has the poten­tial to be trans­cri­bed dis­cur­si­vely.

The violence of representation

Finally, we would like to ques­tion the vio­lence implied by the pas­sage bet­ween the real body and the repre­sen­ted one – or their coexis­tence – in a society where, accor­ding to Baudrillard9 , for ins­tance, body is redu­ced to a system of signs, beco­ming a mar­ke­ta­ble good at the cost of a fun­da­men­tal vio­lence against the real body. In like manner, Agamben’s10 use of eco­no­mic or psy­choa­na­ly­tic models to rethink both the real and the repre­sen­ted body (in art, for exam­ple) may be chal­len­ged or inte­gra­ted into papers. Finally, the vio­lence of repre­sen­ta­tion poses the pro­blem of the body of the reader/spec­ta­tor and allows us to rethink a theory of recep­tion based on the body.

Researchers are invi­ted to send their pro­po­sals to the fol­lo­wing address : labocm­dr@g­mail.com before the 15th of January of 2013, in docu­ment format (.doc). In addi­tion to an abs­tract (500 words max, inclu­ding title of paper), the file should contain the fol­lo­wing infor­ma­tion : name, first name, address, e-mail address, status, dis­ci­pline, ins­ti­tu­tion, cur­rent research. Abstracts and com­mu­ni­ca­tions may be in French or in English. The col­lo­quium, orga­ni­zed by the junior labo­ra­tory “Corps : Méthodes, Discours et Représentations” will take place at the École Normale Supérieure de Lyon from the 17th to the 18th of October of 2013.

La forme symbolique pour Panofsky « désign[e] un mode de signification qui exprime et résulte d’une certaine façon d’appréhender le monde ». La reconstitution de la forme symbolique relève d’une historicisation des formes de la représentation. Cf. Audrey Rieber, « Le concept de forme symbolique dans l’iconologie d’E.Panofsky », Revue Appareil, Articles, Varia, 03/07/2012, URL : http://revues.mshparisnord.org/appa....

Nous renvoyons aux analyses de Roger Chartier dans son article « Le monde comme représentation », in Annales ESC 6 (1989).

La civilisation des mœurs, Paris, Calmann-Lévy, 1973.

Jean Baudrillard, L’échange symbolique et la mort, Gallimard, Bibliothèque des sciences humaines, Paris, 1976.

Giorgio Agamben, Stanze : paroles et fantasmes dans la culture occidentale, Payot & Rivages, coll. Rivages poche petite bibliothèque, Paris, 1998.

For Panofsky, the symbolic form is a mode that expresses a particular vision of the world while being conditioned by this vision. The reconstitution of a symbolic form depends on a historicization of the forms of representation. Cf. Audrey Rieber, « Le concept de forme symbolique dans l’iconologie d’E.Panofsky », Revue Appareil, Articles, Varia, 03/07/2012, URL : http://revues.mshparisnord.org/appa...

See the analyses of Roger Chartier in his article « Le monde comme représentation », in Annales ESC 6 (1989).

Norbert Elias, La civilisation des mœurs, Paris, Calmann-Lévy, 1973

Jean Baudrillard, L’échange symbolique et la mort, Gallimard, Bibliothèque des sciences humaines, Paris, 1976.

Giorgio Agamben, Stanze : paroles et fantasmes dans la culture occidentale, Payot & Rivages, coll. Rivages poche petite bibliothèque, Paris, 1998.